Vos contrats, conditions générales et factures sont-ils en conformité avec les nouvelles conditions de paiement ?

A partir du 1er février 2022, de nouvelles règles s’appliqueront aux conditions de paiement dans les transactions commerciales.

Pourquoi ces nouvelles règles ?

Le législateur belge a apporté des modifications à la loi du 2 août 2002 concernant la lutte contre le retard de paiement dans les transactions commerciales parce qu’il a constaté que les entreprises créancières, en particulier les PME, rencontrent toujours de grandes difficultés en raison du comportement de paiement de leurs clients débiteurs et que les grandes entreprises débitrices profitent de leur position de force pour obtenir des délais de paiement plus longs au détriment des créanciers. Par ailleurs, le législateur a constaté que la loi du 28 mai 2019 n’a remédié à ces problèmes que de manière partielle en prévoyant un délai de paiement maximal de 60 jours en cas de SME2B.

Pour rappel, la loi du 2 août 2002 s’applique aux transactions commerciales, c’est-à-dire à "toute transaction entre des entreprises ou entre des entreprises et les pouvoirs publics qui conduit contre rémunération à la fourniture de biens, à la prestation de services ou à la conception et l'exécution de travaux publics et de travaux de construction et de génie civil". Le législateur vise toute « transaction » au sens du langage courant et donc le fait qu’une partie s'engage à effectuer une prestation ou à fournir un bien contre une rémunération. La qualification juridique est irrelevante. Sont dès lors notamment visés les contrats de vente, de service, de location d’un local professionnel. Par contre, la loi de 2002 ne s'applique pas aux paiements effectués à titre d’indemnisation de dommages (par exemple, l’indemnité payée par une compagnie d’assurance ou encore l’indemnité d’éviction dans un contrat d’agence commerciale).

Quelles sont les nouvelles règles ?

Les modifications apportées à la loi du 2 août 2002 concernent les cinq points suivants :

1) Les délais de paiements

Le principe reste qu’à défaut de clause contractuelle, le délai de paiement est de 30 jours.

Les dérogations contractuelles restent possibles, mais à partir du 1er février 2022, les entreprises – quelle que soit leur taille - ne peuvent plus convenir de délais de paiement excédant 60 jours civils.

Exemple: vous pouvez prévoir un délai de 40 jours à partir de la date ou de la réception de la facture. Vous pouvez également prévoir que la facture est payable à la date ou la réception de la facture + 1 mois. Des clauses prévoyant un délai de paiement de 90 jours ne sont, par contre, plus permises.

Pour certains secteurs, le Roi pourra prévoir des délais de paiement plus longs.

Attention : une clause contractuelle prévoyant un délai de paiement entre 30 et 60 jours peut, en théorie, toujours être révisée par un juge, lorsque, compte tenu de tous les éléments du cas d’espèce, elle constitue un abus manifeste à l’égard du créancier (art. 7).

La disposition concernant les points de départ du délai de paiement a également été adaptée :

Dorénavant, la loi prévoit que le délai de paiement court à partir du jour qui suit celui :

1° de la réception, par le débiteur, de la facture ou d'une demande de paiement équivalente,

ou​

2° de la réception des marchandises ou de la prestation de services, si la date de réception de la facture ou de la demande de paiement équivalente est incertaine ou si le débiteur reçoit la facture ou la demande de paiement équivalente avant les marchandises ou les services.

2) La procédure d’acceptation ou de vérification

Le législateur a constaté que des entreprises contournaient les délais de paiement en convenant contractuellement des délais des procédures de vérification plus longs et en convenant que le délai de paiement ne prenait cours qu’à l’issue de la procédure de vérification, ce qui avaient pour effet de prolonger les délais de paiement.

Pour remédier à ses pratiques, la loi prévoit désormais que le délai de la procédure de vérification ou d’acceptation de la conformité des biens ou des services fait partie intégrante du délai de paiement applicable. Ainsi, le délai de la procédure de vérification ou d’acceptation est de 30 jours si aucun délai de paiement n’est prévu contractuellement. Si, par contre, un délai de paiement est prévu contractuellement, le délai de la procédure de vérification ou d’acceptation et le délai de paiement ne pourront ensemble excéder le délai maximal de 60 jours (ou le délai spécifique prévu, le cas échéant, pour certains secteurs spécifiques).

La possibilité de faire courir le délai de paiement à partir de l’acceptation ou de la vérification permettant de certifier la conformité des marchandises ou des services est abrogée.

Exemple: une clause prévoyant un délai de la procédure de vérification de 30 jours et un délai de paiement de 60 jours prenant cours à partir de la fin de la procédure de vérification, n’est plus permise.

3) La date de réception de la facture

Tout accord contractuel relatif à la date de réception de la facture est dorénavant interdit.

Le texte de la loi prête, selon nous, à interprétation.

S'agit-il de clauses réglant la date de réception ? Dans ce cas, la disposition implique que seule la date de réception effective compte. Des clauses comme "La facture est réputée reçue x jours suivant sa date d'émission" ne seront plus valables.

Le texte peut-il également être interprété comme prohibant des accords contractuels concernant la date à laquelle la facture peut être émise ?​

Dans cette interprétation, des clauses énoncées ci-après ne pourront plus être prévues :

  • prévoir que la facture ne peut être émise qu'après X jours de la vérification / de l'acceptation de la conformité des marchandises ou des services ou
  • Prévoir que les factures doivent être émises endéans un certain délai (e.g. 10 jours après livraison ou fourniture du service, avant le 10ème jour du mois suivant la prestation, …)

4) L’obligation de fournir les informations nécessaires à la facturation

Le nouveau régime contient une nouveauté qui consiste pour le débiteur à fournir au créancier, au plus tard au moment de la réception des marchandises ou de la prestation des services, toutes les informations nécessaires pour pouvoir émettre la facture.

Exemple: communiquer le numéro de bon de commande pour établir la facture ou communiquer le n° de TVA.

En précisant le délai pour le devoir d’information, le législateur souhaite mettre fin aux pratiques de rétention d'informations pour retarder la facturation​

La loi ne prévoit toutefois pas de sanction spécifique en cas de manquement à cette obligation.

5) Les intérêts moratoires et les frais de recouvrement

En ce qui concerne les intérêts et l’indemnité forfaitaire, la loi prévoit désormais que, si le créancier a rempli ses obligations contractuelles et légales et n’a pas reçu le montant dû à l’échéance, le montant impayé est, à compter du jour suivant, majoré, de plein droit et sans mise en demeure, d’un intérêt et d’une indemnité forfaitaire pour les frais de recouvrement encourus par le créancier.

Le débiteur peut échapper aux intérêts s’il peut démontrer :

1° que le créancier n’a pas rempli ses obligations contractuelles et légales, ou

2° qu’il n’est pas responsable du retard, c’est-à-dire que le retard n’est pas dû à une faute qui lui est imputable.

Pour le reste (notamment le taux d’intérêt directeur, le montant de l’indemnité forfaitaire et l’indemnisation raisonnable), la loi reste inchangée.

Que devez-vous faire ?

Les clauses contractuelles qui dérogent aux nouvelles règles énoncées ci-dessus sont réputées non écrites. Dès lors, vous avez intérêt à vérifier les termes de vos contrats et des factures concernant les « transactions commerciales » et, le cas échéant, à les mettre à jour avec les nouvelles règles.

En cas de dérogation contractuelle autorisée, mais dont le contenu est manifestement abusif, le juge peut toujours réviser la clause contractuelle et ordonner la cessation de l’utilisation de cette clause.

Le non-respect de la loi peut également être considéré comme une faute entraînant la responsabilité du débiteur.

Pour toute question relative au nouveau régime des conditions de paiement, contactez-nous par e-mail ou via notre "hotline" (02 891 48 63) ouverte les vendredis 11, 18 et 25 février 2022 de 14h à 16h.

Focus Points

With a view to have an open eye on the future, we follow up on specific (legal) topics at the heart of modern businesses in transition.